Du 14 au 17 juillet 2016, Nath et moi, un peu à l’impro, sommes partis au bord de la Baltique. Après Tallinn et l’Estonie en 2014, nous sommes descendus cette fois ci, un peu plus au sud, dans la capitale Lettone,
Riga, est située sur les rives de la Daugava et blottie au fond d’un golfe, plutôt au nord de la Lettonie. La perle de la Baltique représente à elle seule 1/3 de la population lettone (700.000 habitants), elle est aussi la plus cosmopolite, la plus historique et la plus variée en termes d’architecture, roman, gothique, renaissance, baroque, classique et surtout l’Art Nouveau.
Autant être honnête, avant d’aller en Lettonie, on ne connaissait strictement rien à ce petit pays balte, coincé entre l’Estonie et la Lituanie…et à l’ouest de la Russie. Un petit rappel géographique et historique ne fera de mal à personne je crois. D’abord il ne faut pas oublier que le pays a été sous occupation et domination nazie puis soviétique de 1940 à 1991. L’indépendance a été acquise pacifiquement en 1991 avant l’intégration à l’Union Européenne en 2004, en même temps que ses voisins baltes. La différence avec ses voisins est le caractère encore très russophone (environ 50% des habitants) de la population, ce qui n’ a manqué de poser quelques problèmes au moment de l’indépendance. Aujourd’hui, malgré tout, 9 personnes sur 10 parlent le letton,( langue indo-européenne proche du lituanien), mais aussi souvent 2 autres langues ce qui classe le pays au sommet européen des peuples les plus polyglottes. Nous l’avons constaté, leur anglais, toutes générations confondues, est parfait.
Le drapeau letton est un des plus anciens drapeaux du monde. La légende prétend qu’à l’issue d’une bataille, un chef letton, blessé, a été enroulé dans une couverture blanche. Lorsqu’on a découvert le chef, blessé, la couverture était tachée de rouge des deux cotés. Ses soldats auraient brandi la couverture telle une bannière qui les aurait menée à la victoire. La lutte pour la liberté est récurrente dans l’histoire lettone depuis cet événement.
La vieille ville de Riga
La partie la plus interessante de Riga se trouve dans la vieille ville que l’on a arpentée de long en large, entre églises gothiques, robustes maisons des marchands de la Hanse et façades Art Nouveau. Riga, capitale d’une nouvelle Europe est explosive, mélange tous les genres et les ethnies, parle le letton, le russe et l’anglais, chante, offre des fleurs, à toutes heures du jour et de la nuit, pour preuve, son marché aux fleurs ouvert 24h/24.
Aujourd’hui, Riga s’est définitivement débarrassé de son passé soviétique. Les musées et statues de Lénine qui florissaient autrefois n’existent plus. A présent, la meilleure façon de visiter Riga est de faire fonctionner ses petits pieds. La ville est à dimension humaine, il subsiste des trams du temps de l’occupation soviétique mais l’essentiel peut se faire sans utiliser aucun transport en commun. Il faut aimer marcher et déambuler sur les pavés d’une ville vieille de 800 ans. A chaque coin de rue, on a la chance d’admirer alors, plusieurs centaines de magnifiques maisons et bâtiments.
La maison des têtes noires
Il faut commencer sur la place de l’hôtel de ville (Rätslauskums) qui permet d’avoir à 360° un résumé de l’histoire du pays. Là, on trouve un des symboles de la Lettonie, la maison des Têtes Noires,palais médiéval de style renaissance flamande. Elle abritait la confrérie marchande des Têtes Noires qui organisait la vie sociale de la cité. Juste à coté, le musée des occupations offre un vibrant hommage aux victimes des régimes nazi et soviétique de 1940 à 1991. Depuis 2012, la Maison des Têtes Noires est devenue la résidence officielle du Président de la République de Lettonie.
Les Eglises Saint-Jean et Saint-Pierre
Tout près de là, se trouvent les Eglises Saint-Pierre et Saint-Jean…la flèche de Saint-Pierre culmine à 122 mètres. La vue d’en haut est vertigineuse sur l’ensemble de Riga. Elle date de 1209 et a été construite dans le style gothique. A l’origine, elle était catholique, aujourd’hui c’est l’église évangélique luthérienne de Riga. Il faut absolument monter au sommet de Saint-Pierre, on y accède par un ascenseur à partir du 2ème étage pour admirer à 71 mètres du sol le panorama de Riga, la Daugava, les toits gris rouges, verts et gris, et les clochers de la vieille ville.
Il y’a plusieurs églises et cathédrales dans le vieux Riga, mais l’officielle se trouve sur la place du Dôme, et s’appelle donc la Cathédrale du Dôme de Riga. Elle est considérée comme la plus grande des églises médiévales des pays baltes. Elle est toute de briques et au sommet de sa tour se trouve un coq, symbole de la résurrection du Christ et la permanence chrétienne ( ne m’en demandez pas plus!!). La Cathédrale marque le kilomètre « 0 » du pays.
Le Château de Riga
A quelques pas de la Cathédrale se trouve l’autre siège de la résidence officielle du président de la République Lettone, le château de Riga dont la construction s’est terminée en 1515. Au milieu d’un dédale de ruelles médiévales Riga Pils abrite également le musée d’histoire et le musée des arts étrangers. Sa couleur jaune est un peu étrange, d’emblée quand on arrive devant sa façade , on n’a pas l’impression d’être devant un château mais plutôt un bâtiment un peu massif, sans fioritures, sans reliefs, très simple finalement. En 2016, il est fermé pour cause de restauration, je n’ai aucune idée de la date de sa réouverture.
Les maisons des trois frères et la Tour poudrière
Juste à quelques pas du château se trouve un des batiments les plus visités de la vieille ville, les maisons des trois frères, maisons de marchands (de la fameuse ligue hanséatique) parmi les plus anciennes du pays (XVé, XVIIè, XVIIIè s). Les étages inférieurs étaient habités tandis que les étages supérieurs étaient utilisés comme entrepôts. On peut d’ailleurs voir encore les systèmes de leviers et de poulies permettant de monter les charges. Elles sont situées aux 17, 19 et 21 de la rue Maza Pils. Elles sont jolies et toutes de couleurs différentes. De là, il faut se diriger ver la rue Troksnu, pour aller admirer la seule tour qui reste de l’ensemble des remparts qui entouraient la vieille ville. La Tour Poudrière, donc, qui peut être appelé le cœur de Riga. Il ya 1000 ans, c’était le lieu où s’élevait le château ancien en bois. Au 13ème siècle, lorsque les murs du château d’évêques et du château de l’Epée-porteurs ont été élevés à la portée inférieure de la rivière Riga on a construit la Tour Poudrière- la plus grande des tours de remparts qui gardaient la péninsule et la ville de Riga. Durant de nombreuses années les défenseurs de Riga étaient restés ici parmi les gros canons pour surveiller la ville !
L’ancien Riga était une ville médiévale typique. La plupart de ses rues à partir du 13ème siècle n’ont pas changé leurs directions, et certaines d’entre elles répètent aujourd’hui le débit de la rivière de Riga, qui contournant la péninsule de Riga, se jetait dans la Daugava près du vieux port. La muraille a été construite au 13ème siècle. La Tour de sable ou la Tour Poudrière, comme on l’a appelée plus tard, a été l’un des bâtiments de défense les plus importants à Riga, car il protégeait la route terrestre principale – le chemin de sable. Plus tard, quand on a construit un mur de protection à Riga, avec le développement de la technologie il est devenu nécessaire de l’élever et de le renforcer, le magistrat a émis un décret que tout testament sera invalidé si il n’a pas été offert de dons pour la construction et l’entretien du mur.
Dans un rayon de 100 mètres autour de chaque tour, d’autres tours semi-circulaires et rectangulaires ont été bâties. Il y en avait 28 mentionnées dans les documents du 16ème siècle. Deux tours seulement existent encore actuellement : la Tour poudrière et celle de Ramer qu’on peut voir en suivant la rue Torņu à droite de la Tour Poudrière.
A deux pas de là se trouve la dernière porte de la ville encore debout, la porte suédoise, percée, comme son nom l’indique, par les suédois (qui avaient envahi, je vous le rappelle la Lettonie) en 1698. Les condamnés à mort empruntaient au petit matin ce passage et le bourreau, qui demeurait dans la demeure voisine, accrochait à sa fenêtre une rose rouge les jours d’exécution…charmant!!!
L’Art Nouveau
Riga est considéré comme la capitale européenne de l’Art Nouveau. Ce style, né à la fin du 19ème siècle, début 20ème, appelé aussi Jugendstil est composé de décors floraux, guirlandes tissées, masques expressifs, figures sculptées décorées, lignes fluides, formes géométriques élaborées. Le Jugendstil, de plus ne se limite pas seulement aux façades, mais se retrouve aussi dans les cages d’escaliers, le mobilier, les lustres, les théières et autres. Nous nous sommes cantonnés à l’admiration des façades qui se trouvent principalement dans Elizabetes iela, ainsi que Alberta et Strelnieku au nord de la vieille ville. Il parait qu’il y a au moins 800 batiments répertoriés. Parfois un seul petit détail sur la façade permet de le classer Art Nouveau. Les spécialistes (comme Nath) le remarquent immédiatement..pas toujours évident. C’est parfois sur un détail d’une fenêtre, d’un balcon, de la porte d’entrée que l’on s’en rend compte.
Aujourd’hui, en 2016, le travail de rénovation encore à accomplir est énorme, et c’est principalement ce que je retiendrai en priorité de notre voyage à Riga, il reste encore un boulot pharaonique à accomplir avant de retrouver un Riga resplendissant, on y reviendra dans 20 ans, on verra bien. Je vais peut être un peu me répéter mais la période soviétique, n’en déplaise à mr Mélanchon, n’a pas arrangé cette ville, et tant d’autres, qui disposent de véritables trésors.. sous l’occupation soviétique, je crois qu’il ne fallait surtout pas que cela soit trop beau, trop ostentatoire, et que la richesse apparaisse de façon trop indécente..dommage!!
Dans Alberta iela, au numéro 12, il y a le musée d’Art Nouveau que nous n’avons pas eu malheureusement le temps de visiter mais qui apparemment vaut le coup d’être vu.
Ballade sur l’eauAprès avoir pas mal marché (on aura tout de même fait 44 km en 4 jours), on avait envie de se la couler un peu douce, et quoi de mieux qu’un « promène-couillons », comme me dit souvent un bon copain, pour voir la ville autrement. Plusieurs sociétés proposent le tour complet de Riga sur l’eau. En effet, la Daugava, la rivière naturelle est à l’ouest, un canal à l’est a été construit afin de pouvoir faire le tour complet de la ville. Environ une heure de ballade fluviale qui permet de voir des aspects de la ville insoupçonnés. Confortable, calme, paisible, on a passé un super moment à se délecter des splendeurs de Riga vue de l’eau.
Āgenskalns
Depuis qu’on était arrivés à Riga, nous avions entendu parler d’un célèbre quartier ou se trouvent encore des maisons en bois, certaines très bien rénovées, la plupart encore dans un état plus difficile. Le quartier au nom imprononçable d’ Āgenskalns, situé sur la rive gauche de la Daugava, était autrefois un quartier très ouvrier. Les habitants qui travaillaient à Riga, habitaient dans ce petit quartier historique, en dehors de la ville avec des loyers moins élevés et une vie qui ressemblait d’avantage à celle d’une vie rurale, avec des marchés, des petites maisons, peu de circulation. Aujourd’hui, il y a une tentative par une population plus jeune, plus branchée, plus aisée de reprendre en main ce quartier. Les maisons en bois ont un charme fou, même si la plupart ont encore besoin d’un sacré coup de ravalement. Je pense qu’il doit être très agréable de vivre dans ce petit quartier, à deux pas de la ville. Les transports en commun fonctionnent bien à Riga, ne sont pas chers, sont fréquents et franchement, à Āgenskalns, on a l’impression de vivre à la campagne. Nous avons eu une chance incroyable de rencontrer une jeune femme lettone qui organisait des « walking guided tours » dans le quartier (https://www.facebook.com/AgenskalnsFreeTour/?fref=ts)
Elle nous a parlé avec beaucoup de passion et d’enthousiasme de la vie d’hier et d’aujourd’hui de cet endroit super sympa qu’on aimerait tellement voir se rénover encore plus vite. Le problème vient du fait que certaines maisons ont plusieurs propriétaires et que le quartier n’est pas classé; si tous ne sont pas d’accord ou n’ont pas les moyens pour faire des travaux, personne ne peut les obliger à les effectuer et les choses restent ainsi en attendant que tout le monde se mette d’accord…et ç’est comme chez nous, ça peut durer!!!
Jurmala, la côte d’Azur lettoneon ne peut pas venir à Riga et ne pas se rendre en même temps à Jurmala, à 20 mn en train et quelques euros de la gare centrale de Riga. Alors d’accord c’est un brin touristique, il y a du monde, des vacanciers, tout ce que d’habitude nous fuyons mais franchement être si près de la « côte d’Azur lettone » et ne pas y être allé aurait été dommage. Imaginez, c’est comme si, Paris se trouvait à 20 km de Nice par exemple. Il faut bien sur remettre cela dans le contexte des dimensions lettones, où l’on se trouve toujours, où que l’on soit, à 2 heures de tout. Nous avons donc pris le train en début d’après-midi pour la modique somme de 1 euro 40, 20 minutes et quelques arrêts plus tard, nous débarquons entourés de tous les citadins rigois en quête de soleil, de plage et de mer à Majori, la gare principale de Jurmala. Et là nous comprenons tout de suite que nous avons changé de monde.
Que des locaux, des familles, des serviettes de plage, des enfants, des tenues de vacanciers et un monde fou. Une rue en face de nous, nous emmène à la plage (il y a 30 km de plages de sable blond à Jurmala), des boutiques, des camelots, des spectacles, un festival rock, des restos, des bars, bref, tout ce qu’il faut pour régaler le vacancier letton..et les autres.
Cela dit, on a pris beaucoup de plaisir, on s’est reposés, on a vu de superbes maisons, une plage avec un sable blanc, super fin, magnifique. On a écoutés de la super musique, mangés quelques spécialités lettones, quelques glaces, bref, les vacances. On était aussi là pour ça.
Retour à RigaCe qui est bien en Lettonie, c’est que rapidement, on peut passer d’un monde à un autre. En fin de journée, on a repris le train avec nos amis rigois tous bronzés. 20 minutes plus tard, nous étions de nouveau dans une capitale de l’Union européenne. Sur la route de notre hotel situé rue Elisabeth (celle des batiments Art Nouveau), nous passons devant l’Ambassade de France devant laquelle se trouvent énormément de bouquets de fleurs..deux jours auparavant, le 14 juillet 2016 avait eu lieu un acte de terrorisme odieux à Nice, laissant au moins 84 victimes. Nous nous recueillons un instant, nous sommes même interpellés par des personnes qui nous demandent pourquoi l’on s’acharne ainsi sur la France. On se rend compte à ce moment, que même si nous sommes en Europe, les informations n’ont pas la même valeur dans chaque pays. Ici en Lettonie, les événements de Nice ont fait à peine quelques lignes; chacun à ses problèmes et ce que nous considérons comme important ne l’est pas forcément pour nos voisins et vice-versa. Cela relativise..nous ne sommes pas le centre du monde et ça ne fait pas de mal de s’en apercevoir
L’ambassade de France à Riga
On traine, on finit tout de même par rentrer à l’hôtel…on passe encore par un des monuments les plus emblématiques de Riga, le monument de la liberté, qui est en fait un mémorial érigé en l’honneur des soldats morts au combat durant la guerre d’indépendance lettone entre 1918 et 1920. Ce monument est appelé affectueusement « Milda » par les habitants de la ville. Considéré comme un symbole important de la liberté, de l’indépendance et de la souveraineté de la Lettonie, il est souvent le lieu central de manifestations publiques et de cérémonies officielles. C’est également l’un des monuments les plus hauts d’Europe dans son genre avec une hauteur de 42 mètres.
Le voyage dans ce petit pays balte se termine en douceur. 4 jours et 44 kilomètres à pied, un peu de tram, de train, nous ont permis de découvrir une petite capitale qui sera, dans l’avenir, j’en suis certain, de plus en plus belle. Le nerf de la guerre permettra de dévoiler un potentiel énorme, resté plus de 50 ans abandonné. Riga, tout comme la Lettonie, progresse à pas de géant.
En conclusion, il faudra revenir…
A bientôt